Martine YABRE, Présidente du Collectif devenons citoyens: « Il n’y a pas de différence entre l’homme et la femme en matière de réflexion et d’intelligence »

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Martine YABRE reçoit B24. Ph.B24

Cette semaine, nous avons rencontré pour vous une des personnalités de l’année 2011 désignées par Burkina24. Il s’agit de Martine YABRE, présidente de l’association Opinion de Femme et du CDEC. Elle nous parle de sa vie politique et de son engagement dans la société civile burkinabè. Femme d’action, femme disciplinée, femme dévouée à tout ce qui honore l’humanité, c’est ce que l’on peut retenir après lecture de cet entretien.

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B24: Bonjour et merci de nous recevoir chez vous. Tout d’abord, pouvez-vous nous dire quelque chose sur vous en guise de présentation?

Martine Yabré (M.Y): La présentation sera brève. Moi c’est Martine Yabré. Je suis informaticienne, analyste programmeur de formation. Mais avec quand même des formations assez spécifiques auxquelles j’ai pris part, notamment en administration électorale, parce que j’évolue beaucoup dans ce domaine actuellement.

B24: Dans quel domaine professionnel doit-on vous classer?

M.Y: Pour ce qui est de ma profession actuelle, je peux dire que je suis animatrice sociale. Je suis beaucoup engagée dans le social, en matière d’appui conseil aux groupes et groupements féminins, que ce soit à Ouagadougou ou en province. Je suis aussi dans l’assistance économique par l’octroi de micro-crédit spécifiquement dans le domaine environnemental. Dans ce sens, je collabore avec des IMF (Institution de micro-finance) et des sociétés privées qui font la promotion de certains produits et qui participent à la protection de l’environnement, et évidemment en faveur des activités rémunératrices de revenus pour les femmes.

B24: Vous êtes actuellement beaucoup engagée dans la société civile. Mais avant cela, vous avez fait un tour en politique. Parlez-nous un peu de ce parcours d’un moment.

M.Y: Bon, ça c’est une porte fermée depuis 2005. Fermée de façon claire en matière d’engagement partisan. Cela ne veut pas dire que je ne pose plus d’action politique. Seulement, mes actions depuis 2005 sont des actions non partisanes. Politiques puisque j’interviens dans le débat politique et apporte ma contribution aussi modeste soit-elle, à la construction de notre jeune démocratie ici au Burkina. C’est vrai, ce fut une grande expérience politique de 1996 à 2005. Ce n’est pas rien. J’ai même été candidate malheureuse en 2002 aux législatives. Aujourd’hui, tout ce passé politique me sert d’expérience que j’ai pu capitaliser à d’autres profits. C’est une expérience qui me sert bien d’appui et de socle pour mes activités au niveau associatif.

B24: Que retenez-vous de ce parcours politique aux côtés d’un homme politique comme Hermann Yaméogo?

M.Y: J’ai beaucoup appris. Mon parcours avec l’ADF en passant par l’ADF/RDA et l’UNDD, aux côtés de Me Hermann Yameogo m’a beaucoup apporté en termes d’expériences. J’ai appris avec l’homme sans être passionnée autour de tout ce qui peut se dire. Je peux dire qu’il a été un bon enseignant politique pour moi et que j’ai beaucoup appris à ses côtés. Je ne regrette pas l’engagement que j’ai eu de par le passé et j’avoue que j’entretiens de très bons rapports avec l’homme. Sans être inféodée évidemment.

B24: Et pourquoi avoir délaissé la politique pour la société civile?

M.Y: Je n’ai pas délaissé la politique. J’ai seulement changé de cadre. J’ai quitté le cadre partisan pour un cadre non partisan. Donc je considère que je n’ai pas délaissé la politique. La preuve, je travaille beaucoup avec les femmes des partis politiques et même les hommes, avec des structures comme le NDI [Ndlr : National Démocratic institute] qui travaillent avec les partis politiques, et j’interviens sur un certain nombre de thématique concernant la participation des femmes aux élections, dans des cadres qui sont créés, des cadres hybrides qui intègrent aussi bien la société civile que les représentants des partis et formations politiques. Donc, en réalité je n’ai pas délaissé la politique. J’ai juste changé de cadre. D’un cadre partisan, je suis passée à un cadre non partisan.

B24: Au regard de la faible représentation de la gente féminine dans la sphère politique, comment pensez-vous que l’on puisse améliorer cette représentation et amener plus de femmes à s’intéresser et s’engager en politique?

M.Y: En ce qui me concerne, je n’ai pas de solution miracle. Vous devez quand même être informés que les femmes, toutes tendances confondues, opposition, majorité et société civile, se sont serrées les coudes à un moment donné, créant une sorte de synergie pour l’avancement de leur combat, notamment pour l’accroissement de l’effectif des femmes aux instances de décisions à travers les élections par exemple. C’est de là qu’est venu le vote en 2009 de la loi sur le quota, et je crois que 2012 nous permettra d’expérimenter cette loi aux élections couplées législatives et municipales, et voir dans quelle mesure on pourrait apporter des contributions pour améliorer la loi ou proposer d’autres solutions qui puissent aider à rehausser un peu la participation des femmes à différents niveaux de décision à travers les différentes élections

B24: Pour revenir à la société civile, on entend souvent dire qu’elle n’arrive pas à canaliser ses besoins en matière de Droits Humains. Qu’en dites-vous?

Martine YABRE à son domicile. Ph.B24

M.Y: Évidemment, quand il y a le désordre on ne peut pas arriver à canaliser des vœux en matière de Droits humains. D’abord quand on parle de droits humains, c’est un domaine très vaste. Il y a un grand nombre d’OSC de droits humains aujourd’hui. Vous vous rappelé peut-être qu’en 2006, à la désignation de notre délégué, notre représentant pour siéger à la CENI, nous étions plus de 500 associations. Heureusement que de mieux en mieux, cette composante voit une réduction de son nombre à travers un certain nombre d’activités, de conditionnalités qui se créent tout naturellement. Mais je reconnais qu’il est difficile de pouvoir capitaliser les actions et de pouvoir les traduire en actes en harmonie avec les vœux escomptés par nous OSC de DH, pour la simple raison que nous sommes nombreux. Il n’existe pas à ce jour un indicateur ou un élément qui permette aujourd’hui aux organisations de défense des droits humains de s’identifier par rapport à un domaine bien précis. Il y a eu des débats et des contradictions entre des responsables d’OSC qui estimaient par exemple que les associations de « dolotières » faisaient partie des droits humains. Donc je pense qu’il revient au ministère des droits humains de créer cette synergie avec les OSC et de pouvoir asseoir définitivement une base réelle et par catégorie d’intervention des OSC en matière de droits humains. On devient un peu trop généraliste, alors qu’on ne peut pas être bon partout. Les droits humains sont vastes, comme je le disais. Il y a par exemple le droit à un environnement sain. Là-dessus, il y a des OSC qui s’y intéressent. Une organisation est nécessaire dans ce vaste milieu. Certes, il faut une volonté du ministère, mais aussi la disponibilité d’esprit de responsables d’OSC pour assainir le répertoire et asseoir une collaboration claire qui va profiter à notre jeune démocratie.

B24: Vous êtes présidente de l’organisation Opinion de Femme et du CDEC. Quelle est la réalisation avec ces structures qui vous a marqué le plus ?

M.Y: En tant que Martine je n’ai rien réalisé. J’ai apporté ma contribution dans le cadre de la collaboration avec mes collègues. Opinion de Femme du Faso, est un groupe de personnes ayant, à un moment donné, épousé les mêmes idéologies et décidé de créer cette synergie. J’affectionne le mot ‘’synergie’’ car si aujourd’hui sans collaboration il n’y a pas d’avancement ; c’est mon principe de vie. Je crois qu’à un moment donné ces personnes, soucieuses d’apporter quelque chose à la construction et au développement de notre pays, ont voulu se mettre ensemble et partager des préoccupations à travers des actions. Opinion de Femme a été créée en 2004. Mais, comme pour toute association, au départ tout le monde est mobilisé, puis à un moment donné ce sont les dirigeants qui ont beaucoup plus d’obligation de résultat. Mais c’est un travail de groupe qui nous a permis d’aider des femmes à obtenir un marché, initier un projet de promotion et de vulgarisation du gaz butane et nous avons pu distribuer plus de deux mille sept cent (2700) foyers aux ménages. Nous n’avons pas communiqué autour de ces actions mais elles demeurent. Nous avons aussi signé des conventions avec certaines communes rurales pour la réalisation d’activités. Aussi, nous participons aux débats sur les réformes et donnons des formations aux jeunes, aux femmes et aussi aux hommes.

A un stade de fonctionnement d’Opinion de Femme, nous avons jugé important d’aller vers d’autres organisations de la société civile, notamment les organisations de jeunesse telles que la MJP et Ecole du Citoyen, pour échanger un peu dans le souci d’harmoniser nos points de vue sur certains points. Aujourd’hui la jeunesse burkinabè représente 75% environ de la population, et les femmes au moins 52%, alors nous avons les mêmes problèmes. Nous avons donc décidé de nous mettre ensemble, et cela a donné la synergie que nous appelons « Collectif Devenons Citoyens ». C’est un réseau d’association de femmes et de jeunes. Nous travaillons sur les questions de sécurité des biens et des personnes, et d’élections (genre et élection).

B24: Qu’est-ce qui vous déplait le plus dans la société civile, et qu’est-ce qui vous fait le plus plaisir  en elle ?

M.Y: Ce qui me déplait dans la société civile, et auquel il n’y a de remède que le bon sens et les concessions au niveau individuel, c’est les incompréhensions qui naissent autour d’intérêts communs. Nous avons les mêmes objectifs mais souvent il y a beaucoup de querelles dues au fait que les cheminements pour atteindre les objectifs diffèrent très souvent. Sinon il n’y a que des personnes convaincues qui peuvent oser créer des associations aujourd’hui. Il y a beaucoup de structures et de personnes engagées par conviction, et il y a aussi d’autres qui viennent pour ‘’rechercher le gombo’’.

Paradoxalement ce qui me plait c’est la capacité de la société civile à se réunir autour d’intérêts communs même dans la divergence. Il y a donc une sorte de mythe autour de cette société, des choses qu’on ne saurait expliquer et qui sont à expérimenter.

B24: Quelle impression gardez-vous de votre participation au CCRP en tant que femme et en tant que simple participante ?

M.Y: En tant que femme, j’en ai été satisfaite, sans modestie. Car cela m’a permis de rencontrer d’autres femmes, aussi bien de la société civile que de la politique, qui ont les mêmes opinions que moi en matière de promotion de la femme. Et la même compréhension des choses en matière de genre et développement ou démocratie. Cela a permis un rapprochement qui a encore créé une synergie entre les femmes de la société civile et des partis politiques. Malgré les divergences nous avons pu nous mettre ensemble pour aboutir à des propositions d’abord consensuelles au niveau des femmes, et ensuite appropriées pour les autres membres du CCRP. Et au-delà même de la question de la femme nous avons pu obtenir la constitutionnalisation du genre, qui ne se limite pas qu’aux femmes. Ce n’était donc pas un combat égoïste. Et la preuve en est que par exemple la loi sur le quota donne un quota neutre, qui ne profite pas qu’aux femmes mais aussi aux hommes. La participation au CCRP nous a aussi permis de montrer aux hommes que nous pensons la même chose et sommes à même de réfléchir et faire des propositions peut-être mieux que les leurs. Aussi, nous avons pu dire haut ce que certains hommes pensent et ne peuvent pas dire. Il n’y a pas de différence entre l’homme et la femme en matière de réflexion et d’intelligence.

M.Y: En tant que société civile, je pense que si le CCRP étais à refaire j’y retournerais. Ma participation en tant que représentante des Droits Humains n’a pas été facile, car combattue au départ par l’idée même de la participation, puis incomprise. Mais à la fin je me suis réjouie du fait que plusieurs responsables d’associations, même n’ayant pas ouvertement apprécié la participation des OSC, ont eu le courage de m’appeler pour me féliciter de la clairvoyance que j’ai eu en y allant. Je leur ai répondu qu’en ce qui concerne le Collectif Devenons Citoyens, notre engagement est vraiment citoyen et désintéressé. Nous ne vivons pas de notre engagement dans la société civile, sinon avec la raréfaction des fonds nous ne vivrions plus. Ils ont alors compris que la politique de la chaise vide ne sert pas, et que les suspicions du départ n’ont pas connu une concrétisation car tout simplement il y a eu des gens qui ont eu le courage d’y aller et de dire ce qu’ils pensent pour que ce que nous ne voulons pas ne soit pas. Il y a eu plus de peur que de mal.

B24: Votre appréciation des conclusions des assises ?

M.Y: J’avoue que j’étais convaincue, avec le temps et la qualité des débats qui ont été menés au CCRP, que les Assises nationales ne pouvaient pas faire mieux en trois (03) jours. Heureusement il y a eu les tournées régionales avant les Assises, qui ont permis de prendre en compte des éléments et des propositions en plus de celles du CCRP. Mais il faut dire qu’ils ont juste entériné les propositions du CCRP, en dehors de nouvelles propositions et autres qui ont été faites.

B24: Comment voyez-vous l’atmosphère politique du Burkina Faso en 2015, après les élections ?

M.Y: Je me garde des jugements. Je crois en Dieu et je ne peux pas, avant lui, dire comment sera 2015. Je sais que des miracles peuvent être opérés à tout moment. Mais nous sommes dans un domaine concret et il faut être pragmatique. Aujourd’hui, jusqu’à preuve du contraire, si le principe de l’alternance consacré dans la constitution doit être respecté puisqu’elle n’a pas été changée, je pense qu’en 2015 des candidats vont se présenter aux élections présidentielles. Ils seront citoyens burkinabè et remplierons les conditions requises pour se présenter à ces élections. Le Conseil Constitutionnel et les institutions en charge de cela seront, à mon avis, compétents pour juger la validité de ces candidatures selon la constitution. C’est mon point de vue et je ne veux pas faire de jugement de personne. Dans tous les cas j’ai mon point de vue sur l’article 37. Pour moi, si le peuple ne veut pas qu’on touche à l’article 37 il n’y a pas de raison qu’on y touche. Et pas seulement cet article là. La constitution étant la loi fondamentale, l’expression de la volonté du peuple, on ne peut pas aller contre elle, à moins que le peuple décide que sa volonté n’est plus consacrée dans la constitution.

Si la paix doit passer par nous pour régner au Burkina,

que cela se fasse

Mon souhait c’est qu’en 2015 les élections présidentielles se passent dans un climat paisible, pacifique, pour le bonheur de tous les Burkinabès. Je pense qu’en tant qu’acteurs civils engagés, nous mettrons de nous-mêmes pour apporter notre contribution, de sorte à ce que si la paix doit passer par nous pour régner au Burkina, que cela se fasse.

B24: Votre regard sur ce qui se passe actuellement au Sénégal ?

M.Y: Vraiment c’était prévisible et cela ne devait pas surprendre. Mais les réalités sénégalaises sont différentes des nôtres. C’est dommage que cela se comme cela, mais en même temps, où est-ce que l’Afrique s’en va ? Pour tout ce qui se passe dans les pays voisins, je n’ai aucune réponse mais j’ai des questions que je me pose. Qu’est-ce qui se passe ? Qu’est-ce qu’il y a dans le pouvoir pour qu’on s’y accroche autant et ne pas vouloir le lâcher ? Même chez les voisins (Côte d’Ivoire, ndlr), le fauteuil a créé trop de problèmes !

B24: Vous disiez tantôt que vous êtes croyante, quelle est la part de Dieu dans votre vie ?

M.Y: Dieu passe avant tout dans ma vie parce que mon existence même, tout comme celle des autres, est le symbole d’une volonté divine. L’existence même du Burkina, petit sur une carte du monde entier, est l’œuvre de Dieu.

M.Y: B24: Est-ce un handicap d’être femme dans la politique ?

Non. Le fait d’être femme n’est pas un problème. Seulement il y a beaucoup de difficultés auxquelles on fait face, dans la mesure où, dans la tradition, le passé, il y a ce terme ‘’pag la yiri’’ en mooré que l’on aimait employer pour dire ‘’la femme c’est le foyer’’. Mais il n’est plus trop d’actualité même dans les faubourgs reculés, car la femme va aux champs et cherche de l’argent. En ville, même si la femme est fonctionnaire et qu’elle a une fille de ménage, elle doit souvent mettre sa main dans le ménage pour suivre ce qui s’y fait et tenir son foyer, son homme et ses enfants ; elle demeure une femme. La femme, de par sa nature, ses responsabilités et charges sociales assez spéciale, doit s’organiser avec son conjoint et avec elle-même. C’est vraiment important.

Les difficultés que les femmes vivent dans les partis politiques sont d’abord et surtout économiques, ensuite il y a le poids de la famille par moment. Aujourd’hui il y a beaucoup d’hommes qui ne jouent plus leur rôle dans les foyers, alors toute la charge familiale pèse sur le dos de la femme qui se retrouve en même temps chef de famille pendant que l’homme vit toujours.

La pauvreté a un visage féminin

Mon conseil aux autres femmes dans la politique est de s’armer de courage car rien n’est facile en définitive. Seulement il faut qu’on se dise que les hommes n’ont pas de pouvoir spécifique ou particulier qui les privilégie aux femmes en politique. Nous avons les mêmes droits civils et politique, au-delà de ça les mêmes capacités intellectuelles. Je crois que c’est une question de formation qu’il faut maintenant poser : comment faire pour que les femmes, à travers leur engagement en politique, arrivent à atteindre les objectifs qu’elles escomptent. Qu’elles ne soient plus utilisées pour compléter des listes par exemple. Qu’elles ne soient plus appelées uniquement pour la mobilisation. Il en est de même pour les jeunes dans les partis. La pauvreté a un visage plus féminin que masculin, et le partage du gâteau dans les partis politiques se fait plus entre les hommes au plus haut niveau que les femmes et les jeunes qui sont toujours des laissés pour compte. Ce sont les réalités que les femmes vivent même si elles sont les plus actives.

Les gens doivent accepter de ‘’partager le gâteau’’

avec les femmes et les jeunes

Capitaliser leur participation pour qu’elles puissent émerger au niveau des différentes instances, là est le problème. Et c’est là que la bataille doit se mener en terme de négociation et de stratégie pour que les gens apprennent à accepter de ‘’partager le gâteau’’ avec les femmes et les jeunes. Aucun parti ne peut se développer et gagner sans les femmes et les jeunes. Si un jour les femmes et/ou les jeunes s’entendent pour boycotter des échéances, ce sera catastrophique pour notre processus démocratique. Ce sont donc des composantes qui sont incontournables en matière de gestion ou fonctionnement de la vie d’un parti politique.

B24: On parle de plus en plus de l’incivilité des citoyens burkinabè, de la délinquance au sommet de l’Etat, de pillage de deniers publics, de la corruption à tous niveaux… le pays ne va pas bien. Avez-vous une solution à proposer pour en finir avec ces problèmes ?

M.Y: Il n’y a pas de solution miracle. L’incivisme, la corruption et tous ces maux, c’est un comportement et il est difficile de faire changer un comportement. Quand quelque chose pourrit c’est soit par la tête soit par la queue que ça commence. Encore faut-il que ceux qui traquent les fautifs aient les mains libres pour le faire. C’est vraiment déplorable que ce soit ainsi. Je n’ai pas de solution miracle sinon vous savez aussi bien que moi que le gaspillage des biens publics et même leur utilisation à des fins personnelles ou douteuses ne profitent pas à notre développement.  Aussi ce n’est pas tous les fautifs qui sont traqués, et il y a des dossiers qui sont restés pendants jusque là. Il suffit d’une volonté politique réelle pour juguler ce phénomène, qui commence au plus haut niveau, pour faire bouger les choses. Ceux qui arrivent à détourner de gros fonds c’est ceux qui ont de gros postes.  Et ceux qui occupent ces postes sont des gens qui sont souvent nommés, qui bénéficient d’une certaine protection par moment, de sorte qu’ils se croient intouchables. Alors si ceux qui nomment sanctionnent tous les fautifs à la même échelle, ça va changer. C’est mon avis.

B24: Que pensez-vous du fait que Burkina24 vous ait retenue parmi les personnalités de 2011 ?

M.Y: J’en suis très émue et surprise, et en même temps flattée car je me rends compte qu’il y  des personnes qui m’observaient discrètement. Je suis engagée depuis bien des années, et si 2011 a été une année où on a pu m’identifier quelque part, à travers un organe aussi jeune que le vôtre, je ne peux que m’en réjouir et souhaiter vivement qu’à votre organe Dieu puisse accorder ses bonnes grâces afin que le travail que vous avez commencer puisse connaître une bonne fin et que vous prospériez dans la justice. Car c’est rendre justice et au-delà reconnaître le travail de quelqu’un, son illustration au cours de l’année et c’est un grand réconfort pour la personne. Je suis réconfortée de savoir que les actions qui sont menées, même quand on récolte des maigreurs et qu’on rencontre des difficultés sur le chemin, on finit par être réconforté. La surprise au-delà de ça c’est que j’ai reçu cette information d’un homme politique qui m’a appelée de la Belgique, un ancien candidat à la présidentielle passée, qui m’a appelée vu le fait que nous avons eu une très bonne collaboration au niveau des réformes politiques. Il m’a dit : « Je lisais tout de suite sur Burkina24 et j’ai vu qu’ils parlent de toi ». Je lui ai demandé ce que c’est que Burkina24 et il m’a envoyé l’adresse du site. C’est comme cela que j’ai reçu l’information. Je ne peux que vous encourager.

B24: Quel est le regard de votre famille sur la vie que vous menez ?

M.Y: Je suis issue d’une fratrie de cinq enfants dont trois filles et deux garçons. Je n’ai aucun problème avec eux. Au départ c’était difficile, chacun me disait que j’ai fini ma formation universitaire et que je dois chercher du travail. Je leur rétorquais que ce que je fais est un boulot ! La grande famille me reprochait mon engagement ouvert. Et face à cela, j’aime répéter une expression d’Hermann Yaméogo qui dit qu’ « un homme qui n’inscrit pas la mort dans son combat n’a pas de raison de s’engager. » Ce n’est pas pour dire que je veux mourir, mais qu’il faut savoir prendre des risques. Mais aujourd’hui je n’ai aucun problème avec la famille et la preuve en est que mon oncle maternel se retrouve aussi dans la société civile alors que c’est lui qui me faisait le plus de reproches par rapport à cela. Pourtant aujourd’hui, il est le président de la Ligue des Consommateurs du Burkina. Alors je n’ai que le soutien de ma famille, donc, plus de problème. Je n’arrive pas à convaincre quelqu’un de me suivre car on trouve que je prends trop de risques, mais personne n’est contre ce que je fais et j’ai au moins l’appui moral.

B24: Merci de nous avoir reçus chez vous, Martine YABRE. Un mot de la fin ?

M.Y: En conclusion je souhaite que Burkina24 aille de l’avant. Je lancerai même un appel au PTF d’être regardant sur des structures comme la vôtre car votre action participe à la promotion de la femme. J’ai aussi été identifiée comme personne-ressource, et cela contribue à renforcer l’image de marque des femmes à travers moi et du combat que nous les femmes menons au Burkina. Merci.

Entretien réalisé par Stella Nana pour Burkina24

 


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