L’Afrique et la CPI : les raisons de la discorde

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Les Africains et la Cour Pénale Internationale n’entretiennent plus de bonnes relations. Depuis l’inculpation du président soudanais Omar El Béchir pour génocide, les désaccords et les couacs entre les Etats africains la CPI sont de plus en plus fréquents. Dernier symptôme en date de ce malaise, l’intention du Kenya de se retirer de la Cour.

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L’affaire du moment à la CPI concerne le Kenya dont le président Uhuru Kenyatta et le vice président William Ruto sont poursuivis pour crime contre l’humanité depuis janvier 2012. En rappel, ces accusations font suites aux violences enregistrées après les élections présidentielles de 2007 où environ 1000 personnes avaient perdu la vie. Aujourd’hui, ces deux hommes qui appartenaient à l’époque à des camps différents, ont été élus à la tête de l’exécutif Kenya sur la base d’un ticket commun.

Alors qu’ils doivent répondre devant la CPI, le parlement Kenya a voté le 5 Septembre dernier une motion de retrait du traité de Rome qui a donné naissance à cette cour.

Bien que cette action ait une portée fortement politique, il semble qu’il ne s’agit pas d’un coup de bluff et que le pays a la ferme intention d’être le premier pays à se retirer de cette institution judiciaire internationale sujette à tant de critiques. Toute chose qui risque entraîner une vague de retraits en Afrique, la zone qui compte le plus grand nombre d’Etats ayant ratifié le traité de Rome.

Quelle est la source de ce désaccord entre l’Afrique et la CPI?

La principale raison est le sentiment d’injustice que ressentent les dirigeants africains pour qui la CPI s’est éloignée de son objet juste pour se muer en instrument politique qui visiblement n’a les yeux que sur l’Afrique et ses dirigeants et n’opère qu’« une chasse raciale ».

Pourquoi une telle position tranchée ?

Plusieurs faits alimentent le désaccord entre les Chefs d’État africains et la CPI. Et la plus en vue, c’est que la quasi-totalité des inculpés de la CPI depuis sa création (Soit une trentaine) sont Africains.

Mais, la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, a été l’inculpation du président Omar El Béchir pour génocide. Tout ceci dans un contexte qui a fait naître des soupçons sur les réelles motivations de la cour. En effet, à un moment où les négociations sur la scission du pays (pour donner naissance au Sud Soudan) étaient intenses, une telle inculpation ne pouvait apparaître que comme un instrument de pression internationale sur la personne du président soudanais. Il faut ajouter à cela qu’il s’agissait d’un chef d’Etat en exercice et que c’était la première fois qu’un président en fonction était inculpé; ceci, sans oublier également que le Soudan n’est pas membre du traité de Rome au même titre que les USA et Israël par exemple.

Cette inculpation a créé une levée de boucliers de la part de l’écrasante majorité des pays africains avec entre autres leaders de la fronde, le colonel Mouammar Kadhafi. Pour la première fois, des Etats membres refusaient ouvertement de coopérer avec la Cour pour faire arrêter une personne inculpée, lequel refus demeure sur le cas d’espèce.

Un autre épisode marquant de cette tension, le dossier Ivoirien où le président Laurent Gbagbo pendant les derniers moments de la crise post électorale dernière, allait être poursuivi pour crime de guerre et crime contre l’humanité. Cela allait aboutir à son transfert manu militari à la Haye. Aux yeux de nombres d’observateurs c’était le début d’une justice des vainqueurs à laquelle prenait part la CPI au profit des nouvelles autorités ivoiriennes.

Le dernier épisode des relations troubles entre les dirigeants africains et la CPI, fut l’inculpation du Guide Libyen le colonel Mouammar Kadhafi, au plus fort des frappes occidentales sur son pays. Encore une fois, l’inculpation apparaît comme un moyen de pression pour faire plier des dirigeants alors même que dans le cas libyen aucune enquête n’était possible en ce moment.

Tous ces éléments viennent mettre de l’eau au moulin de ceux qui pensent que la CPI n’est qu’un instrument de domination des plus puissants sur des « petits ». Est-ce à dire, comme interrogeait Jean Ping (alors président de la Commission de l’Union Africaine), qu’il ne se passe rien ailleurs ? Où sont les inculpés de crimes en Afghanistan, Irak, Israël, Chine ?

Youssouf Bâ

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Youssouf Bâ

Juriste, Spécialisé en Droit de l'Intégration. Journaliste, Poète.

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