Opinion- « Non Abdou Sané, je n’ai aucune haine contre Jammeh ! »

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« Pourquoi tant de haine envers Yahya Jammeh? » Telle était l’interrogation d’Abdou Sané dans une tribune publiée sur Burkina24. Charles Sanches lui répond à travers les lignes qui suivent. 

Cher grand-frère Abdou Sané,

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Les gens qui se battent pour la justice n’ont aucune haine. Ce sont ceux qui, méticuleusement, kidnappent le bien à des fins personnelles, pour eux, leur famille et leurs affidés qui ont de la haine envers l’humanité.

J’étais surpris de vous voir soutenir Yaya Jammeh, non pas parce que vous n’avez pas le droit de soutenir qui vous voulez mais parce que je vous sais attaché à la justice et au bien.

Peut-être, faites-vous partie de nombreuses personnes flouées par la fausse verve anti-impérialiste de Jammeh. Sa posture est séduisante, Jammeh contre l’Occident, ça fait un peu David contre Goliath. Sa mise permanente de grands boubous blancs, le Coran dans la main droite, un sabre dans la main gauche en fait presque un personnage de pureté. Si seulement ce n’était que ça !

Je ne sais pas s’il vous arrive d’aller en Gambie. Moi, j’y suis allé, plusieurs fois, pour assister aux sessions de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP).

J’y suis même allé déjà en vacances avec mon ex-épouse, les hôtels n’y sont pas chers, il y a de belles plages, plein de restos, des magasins où on peut acheter de la pacotille en tout genre pour pas cher… La vie y est douce pour l’étranger fortuné qui y débarque bien qu’il perçoive une chape de plomb. Il y a des checkpoints réguliers de la police et la nuit ce sont carrément les militaires lourdement armés qui contrôlent les paisibles citoyens.

Je ne vous parlerai pas des rapports publiés ça et là, des faits divers macabres relatés dans la presse ni des choses connues qui montrent le visage hideux du régime de Jammeh. Puisque vous avez fait un témoignage, je me contenterai d’en faire également un.

La première fois que j’y suis allé pour les vacances avec mon ex-épouse, c’était en 2007 (je traverse ce pays depuis l’âge de mes 2ans pour aller en Casamance et en Guinée-Bissau où j’ai de la famille). Panafricaniste convaincu, j’étais excité de pouvoir montrer à mon épouse un autre visage de mon merveilleux continent. Nous ne connaissions pas grand-chose de ce pays, j’avoue.

Déjà, pour les formalités d’entrée et de séjour, j’étais surpris par les facilités dont mon épouse française avaient bénéficié, on lui avait accordé un visa de 90 jours sans bourse délier. Pour ma part après de multiples questions sur les raisons de mon séjour, je n’avais pas pu obtenir plus de 7jours après que nous ayons dit que nous étions là pour 5jours et après avoir payé des frais administratifs. Premier choc.

Deux jours après notre arrivée, nous en avions marre de la plage, de la piscine de l’hôtel à Serekunda (la plus grande ville gambienne, situé à environ 10km au sud-ouest de la capitale Banjul) et nous nous sommes dits que nous devions partir à la rencontre des gambiens. Nous avons marché hors des grandes artères et là consternation. Presque aucune maison en dur, des sortes de taudis améliorés, des canalisations à ciel ouvert, l’insalubrité, la promiscuité, une jeunesse abandonnée…

Ma femme s’est faite une amie, une vendeuse de fruits. Elle nous a invité chez elle. La pauvreté était frappante. Son jeune frère était là avec ses amis en train de faire du thé. Me suis demandé si aucun d’entre eux ne travaille. Non aucun d’entre eux ne travaillait. Il était 14h00, ils étaient une bonne douzaine à fumer de la marijuana.

J’avais peur que la police nous trouve-là avec toute cette marijuana et je le leur ai dit. Réponse de l’un d’eux : « Jammeh, nous a tout pris, au moins nous laissera-t-il notre chanvre indien ».

A la fin de notre visite, nous avons demandé à la dame si nous pouvions l’inviter à diner avec nous, elle préférait qu’on lui offre un sac de riz. Un sac de riz ça faisait beaucoup pour nous mais nous le lui avons quand même offert. Nous avons évité de renouveler l’expérience, bien que nous avons essayé de parler avec le maximum de Gambiens.

Dans la rue qui menait à l’hôtel sur Senegambia Junction, il y avait une présence assez imposante des forces de l’ordre pour filtrer les entrées : les gambiens lambda n’avaient pas droit d’entrée, sous prétexte qu’on voulait lutter contre la prostitution alors que cela se faisait sous d’autres formes.

Pourquoi personne ne se demande la raison pour laquelle la prostitution masculine est si développée en Gambie. Je disais sous forme de boutade n’avoir jamais vu autant de jeunes rastaman avec des septuagénaires blanches au km2. Il ne faut pas avoir peur de parler de cela également.

Une autre fois, j’ai visité l’université de Banjul, très belle architecture. J’avais un projet sur lequel je travaillais avec l’ancien recteur le Dr Abubacarr Senghore, actuel ministre des Affaires étrangères, j’ai été frappé de voir le portrait de Jammeh sur tous les fonds d’écran des ordinateurs de l’Université.

Je vous fais l’économie de toutes les disparitions forcées, des exécutions sommaires, de la torture érigée en mode d’interrogatoire dans les postes de police et les lieux de détention transitoire…

J’ai moi-même assisté de loin au passage du convoi présidentiel, lourdement armé comme si le pays était en guerre. Le président Jammeh jette des bonbons à son peuple et si quelqu’un a l’audace de ne pas se baisser pour ramasser les bonbons comme un chien, il est pris à partie par ses sbires.

Non Yaya Jammeh n’a aucun attachement aux aspirations de son peuple. Il est loin de ce que vous pensez de lui.

Non Abdou Sané, je n’ai aucune haine contre Jammeh, c’est lui qui en a envers son peuple !

Charles Sanches

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