«Adjugé» en représentation à Tunis : Des espoirs en désespoirs

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La pièce burkinabè «Adjugé», en compétition pour la 19e édition des Journées théâtrales de Carthage (JTC), a été programmée, pour deux représentations, et ce, le mardi 13 décembre 2017, à Tunis.

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C’est dans un décor simpliste, composé de cadres métalliques blancs pour symboliser les ouvertures de la maison, de calebasses, de deux chaises, d’une table, et d’un carton de livres, que les différentes scènes de l’unique acte d’«Adjugé» se déroulent.

Job Polma a été licencié de la société dans laquelle il travaillait mais réintégré comme agent saisonnier pour compléter le nombre d’années requis pour bénéficier de la retraite. Il vit dans la concession qu’il a héritée de son père avec ses deux enfants : Franck préparant un master de gestion et Eliane, une lycéenne qui a la charge, également, d’entretenir le foyer après le décès de sa mère suite à une maladie.

Son autre fils Romaric, diplômé de typographie au chômage, est parti en clandestin à la recherche d’une vie meilleure, mais il n’a trouvé qu’un monde meilleur. Romaric est mort noyé, comme tant d’autres qui pensent que la fortune est ailleurs, au-delà des mers et des océans.

 Mais cela, Job ne le sait pas. Franck et Eliane le lui cachent, car le lui dire serait comme l’assassiner. Job compte sur Romaric pour trouver un travail à l’étranger et leur envoyer de l’argent afin que lui Job rembourse emprunt et dette qu’il a contractés pour le départ de son fils et suite au décès de son épouse, auprès d’une banque et d’un usurier. Un usurier à la solde d’un Occidental et qui fera rembourser Job, de manière inacceptable, à travers ses deux enfants.

La dramaturgie de la pièce tient à une phrase : «Il souffle une froide bise aujourd’hui. Je me demande si la flamme de la bougie tiendra à la prière du rosaire ce soir». En effet, dans cette phrase reposent tous les espoirs de Job et de ses enfants. C’est à cette flamme de la bougie que s’accroche tout désespéré qui garde la foi en un avenir radieux, renforcé en cela par la prière du rosaire, qui, chez les Chrétiens, est très recommandée et qui purifie de nombreuses forces négatives.

D’ailleurs, cette foi en Dieu est présente dans les prénoms des personnages. Prenons le prénom du père «Job», qui vient d’un personnage de l’«Ancien Testament» très riche et très pieux, qui, pour plusieurs raisons, se retrouve à vivre dans le dénuement le plus total. L’expression ne dit-elle pas «pauvre comme Job» ?

Le «Job» de la pièce possède une concession de 450m2 à vue de l’œil de Brice Kollin, un expatrié, homme d’affaires installé dans le pays, très influent auprès des autorités locales, qui déclare dans une des scènes : «Ça vaut les 450 m2 hein ça». Puis le «Job» de la pièce ne s’en n’est pas remis en sa foi en Dieu mais a été tenté par le diable en envoyant son fils aîné vers l’ailleurs meilleur.

 Eliane, aussi, a trait à Dieu, puisque son prénom est dérivé du masculin hébraïque Elie qui signifie «Mon nom est Dieu», ou, dans une autre interprétation, «Dieu m’a répondu». Les deux autres prénoms sont en contradiction avec ceux du père et de la fille puisque Franck est dérivé de François, qui en latin signifie «de condition libre ou homme libre» et Romaric est un prénom issu du germain «hrod, maht et rik» donnant «Gloire, force et roi» et qui peut être traduit par «Roi puissant et glorieux». Franck ne sera pas un «homme libre» puisqu’il a été «adjugé» à un travail «bénévole» de 37 mois en paiement d’une partie d’une dette de son père, et Romaric ne sera jamais comme un roi puissant et glorieux puisqu’il est mort et ne pourra, donc, jamais faire ses preuves et aider financièrement sa famille.

Les thématiques soulevées à travers ce drame sont «tiers-mondistes», voire «quart-mondistes» : la perte d’un emploi, l’absence d’un être cher, la décadence, la misère, l’immigration clandestine, la bassesse, le tout dominé, bien évidemment, par (selon où l’on se place) le manque et le besoin d’argent. Job et ses enfants manquent d’argent et quand le père rentre avec un peu de billets, c’est la joie. Taram (homme d’affaires africain, usurier exploitant un site d’orpaillage) et Brice Kollin, eux, ont besoin d’argent. C’est toujours ceux qui en ont le plus qui en réclament le plus. Kollin et Taram, personnages avides, ont trouvé leur chaudron magique dans les enfants de Job.

La mise en scène et la scénographie suivent la dramaturgie du texte, ce qui permet au public d’entrer dans le jeu des comédiens, dans la souffrance d’un groupe de personnages et dans la mesquinerie de l’autre groupe. La pièce arrive à s’équilibrer jusqu’au bout avec un retour, malgré la décadence psychique de Job, à cette «flamme de la bougie» qui donne l’espoir de tenir jusqu’«à la prière du rosaire», qui, finalement, est la fin de la vie physique et le début des mystères divins.

Zouhour HARBAOUI

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