Burkina: « Le handicap n’est pas la personne, il est créé par l’environnement » (Elie Bagbila)

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Un atelier de formation sur le Handicap au profit des journalistes initié par l’ONG Light for the world, s’est tenu du 28 au 30 octobre 2019, dans la cité de l’épervier, Manga.

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 La mise en œuvre de l’article 8 de la Convention des Nations Unies relative aux Droits des Personnes Handicapées (CDPH) à savoir, les mesures efficaces et appropriées en vue de combattre les stéréotypes, les préjugés concernant les personnes handicapées,  la représentation positive de la personne handicapée à travers les publications, et la facilitation à l’inclusion de la personne handicapée, ont été les objectifs de cette formation

« Le constat est qu’il y a des dispositions de la convention des droits de personnes handicapées qui ne sont pas connues par les organes de presse, surtout les articles  8 et 21 qui parlent de soigner l’image de la personne handicapée, à travers leurs productions. Nous avons voulu combler ce déficit au niveau des médias du Burkina, en les conviant à cette session de formation (…) », a expliqué Elie Bagbila, Directeur pays de l’ONG Light For the World, Burkina

Selon le rapport mondial sur le handicap de 2011, on estime à plus d’un milliard les personnes handicapées, soit 15% de la population mondiale. Ce chiffre est plus élevé que les estimations antérieures de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) de 1970 qui évoquaient une proportion de 10%.

Aussi, la Banque Mondiale estime que les personnes handicapées représenteraient 20% des plus pauvres. 150 millions d’enfants de moins de 18 ans vivent avec un handicap, 20 millions de femmes deviennent handicapées de suite de complications durant la grossesse/accouchement.

les communicateurs plaident pour l'apllication effective des lois sur les personnes vivant avec un handicap

Des efforts 

Dans ce contexte international marqué par une prise de conscience sur la nécessité d’inclusion des personnes handicapées, le Burkina Faso n’est pas resté indifférent. En effet, le pays a admis et soutenu la quasi-totalité des initiatives et textes internationaux, mais aussi pris des dispositions au niveau national en faveur des personnes handicapées.

Dans cette perspective, l’Etat burkinabè a consenti beaucoup d’efforts se traduisant par la ratification et l’adoption à partir de 2009, d’un certain nombre de textes juridiques et de mesures pour répondre aux préoccupations des personnes handicapées et faire de la société burkinabè une société véritablement inclusive. Le Burkina est un bon élève en matière d’adoption de loi, mais l’est-il en application ?

Les communicateurs, Elie Bagbila, Directeur pays de l’ONG Light for the world, et Souleymane Ouédraogo, Juriste, Attaché en Etudes et Analyses au Ministère des Droits Humains et de la Promotion Civique (MDHPC), saluent les efforts du pays se traduisant par la ratification et l’adoption à partir de 2009, d’un certain nombre de textes juridiques et de mesures pour répondre aux préoccupations des personnes handicapées et faire de la société burkinabè une société véritablement inclusive et plaident pour son application effective.

« La loi 2010-012/an portant protection et promotion des droits des personnes handicapées est le premier instrument législatif de portée spécifique et intégré des droits humains des personnes handicapées, adoptée par le Burkina Faso le 1er avril 2010. Elle est l’implémentation de la convention internationale relative aux droits des personnes handicapées, dans l’ordonnancement juridique interne de notre pays. A ce titre, elle est exécutée comme loi de l’Etat, c’est-à-dire que son application a un caractère national, général et impersonnel (article 58) », explique Souleymane Ouédraogo

les participants, une vingtaine de journalistes venus des quatre coins du Burkina ont reçu des attestations.

Elie Bagbila, Directeur pays de l’ONG Light for the world pour le Burkina, a défini la personne handicapée. « Par personne handicapée, on entend des personnes qui présentent des incapacités physiques mentales, intellectuelles ou sensorielles, durables dont l’interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité avec les autres », souligne-t-il.

 « En termes de lois, le Burkina est mieux nanti pour la protection et la promotion des droits des personnes handicapées. Ce qui manque un peu, c’est au niveau application. C’est une occasion pour nous de lancer un appel aux dirigeants, à l’ensemble de la classe politique à soutenir le gouvernement pour qu’il y ait une application effective des textes et lois que nous avons ratifiés », explique-t-il. « La loi burkinabè m’interdit d’enseigner ou d’être infirmier », révèle Elie Bagbila.

Souleymane Ouédraogo, Juriste, Attaché en Etudes et Analyses au Ministère des Droits Humains et de la Promotion Civique (MDHPC), SG du réseau national des organisations des personnes handicapées, SG de l’union nationale des associations burkinabè pour la promotion des droits des aveugles et malvoyants, a perdu la vue à l’âge de sept ans. Il raconte son parcours de combattant.

« J’ai perdu la vue à l’âge de 7 ans suite à une épidémie de rougeole. J’ai rejoint Ouagadougou, par la suite où j’ai fréquenté une école catholique à la cathédrale. J’ai appris à lire le braille, l’écriture des aveugles. Ensuite, j’ai intégré une école ordinaire, à Koulouba jusqu’au CM2 où j’ai eu mon CEP et l’entrée dans les années 90. J’étais pratiquement le tout premier élève aveugle à être inscrit dans un établissement secondaire, le lycée Philippe Zinda Kaboré. L’intégration n’a pas été facile (…).

Le développement inclusif, la participation est une notion clé du développement. Accepter faire du handicap une question de développement.

J’ai eu le bac série A4, j’ai été affecté à l’université de Ouagadougou, dans la filière, Science Juridique et politique. Il fallait se battre avec les camarades pour pouvoir suivre les cours, aller au restaurant. En 4 ème année, j’ai pris part aux examens, j’ai été soumis aux mêmes sujets, j’ai eu la maîtrise en droit des affaires.

Un autre challenge s’est ouvert à moi : celui d’avoir un emploi. J’ai voulu travailler dans le domaine de la justice, j’ai voulu être magistrat, en 2007, et 2008. Mes dossiers ont toujours été rejetés. En 2009, j’étais prêt à saisir la justice parce que la loi ne m’interdit pas de passer un concours. L’administration est revenue sur sa décision à la veille de la composition, et malheureusement, ça n’a pas marché. Normal parce que pendant que les autres ont eu un mois pour se préparer, moi, j’étais dans des tractations (…).

Depuis 2012, il y a eu des avancées. A partir de 2014, il y a eu des recrutements. Il y’a eu près de 97 personnes qui ont été recrutées. Apres tout ça, il y a eu une régression. Le Burkina Faso peut mieux faire, d’autant plus-que les personnes handicapées ont prouvé qu’elles avaient des compétences, qu’elles pouvaient contribuer au développement ».

Le programme de réadaptation à base communautaire (RBC) a vu le jour en 2006 grâce à l’appui Light For the World. La RBC, une stratégie du développement communautaire pour la réhabilitation, l’égalisation des chances et inclusion et de réduction de la pauvreté pour toutes les personnes handicapées. «Gali Saturnin Wend-Yam, fils de Marguerite Sawadogo vivant à Manga, a été l’un des premiers bénéficiaire, du programme RBC« , explique Dénis Zoungrana, un des acteurs dudit programme.

le handicap n’est pas la personne, le handicap est créé par l’environnement

A la rencontre de  Saturnin Gali, 15 ans, ayant un handicap moteur ou déficience motrice

Il est 8h40 quand nous arrivons chez Gali Saturnin. Sa mère nous informe qu’elle va d’abord donner le petit déjeuner à son fils avant de nous rejoindre.  Vers 10h 30, Marguérite avance avec son fils, assis dans un fauteuil roulant. C’est un jeune homme, souriant, bien habillé, qui nous a serré la main. Gali est bien connu, ici, à Manga et particulièrement au RBC. Il souffre malheureusement de plusieurs handicaps, moteur et intellectuel. Mais cela n’enlève pas le sourire de Galil.

« C’est un enfant qui est né  avec sa situation. A sa naissance il a été réanimé, durant 7 minutes. Depuis ce jour, le calvaire a commencé« , raconte sa mère.  Rééducation à l’hôpital Charles de Gaulle, traitements à la médecine traditionnelle, prière etc, la maman de Galil ne s’est jamais fatiguée quand il s’agissait de la guérison de son garçon. « Quand j’entends parler qu’il y a un produit quelque part, je pars avec mon enfant », dit, elle. Le rejet de la société, elle et son fils en ont payé les frais. Son mari a depuis la naissance de Gali, abandonné sa famille. « Tout le monde me fuit, enfant, adulte vieillard. Ça ne me décourage pas », renchérit-elle.

«J’ai entendu qu’il y a une école catholique  pour les enfants en situation de handicap. Il s’est vite intégré dans cette école, il y était heureux (…). A la classe du CE1, Gali a senti un rejet de la part de son enseignante, et depuis lors, il refuse de retourner à l’école », déplore sa maman.

« (…) La personne vit une déficience, a des limitations mais ces limitations ne l’empêchent pas de vivre sa vie. Mais ce sont ses rapports sociaux avec l’environnement s’il y a des obstacles qui l’empêchent de mener une vie normale. On dit que la personne est en situation de handicap, le handicap n’est pas la personne. Le handicap est créé par l’environnement », soutient Elie Bagbila

La journée internationale des personnes vivant avec un handicap sera célébrée, le 03 décembre 2019. Elle est analysée comme une journée de plaidoyer. 

A la fin de la formation, les participants, une vingtaine de journalistes venus des quatre coins du Burkina ont reçu des attestations.

Irmine KINDA

Burkina24

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