Wolfram Vetter : « Le Burkina Faso est fréquentable »

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Wolfram Vetter est le nouvel ambassadeur, Chef de Délégation de l’Union européenne au Burkina Faso. Dans cette interview accordée à Burkina 24, le mardi 26 novembre 2019, il revient sur la coopération entre l’Union européenne et le Burkina Faso dans plusieurs domaines dont la lutte contre le terrorisme. 

Burkina 24 : Vous êtes le nouvel ambassadeur, Chef de Délégation de l’Union européenne au Burkina Faso. Comment avez-vous appréhendé votre nomination pour Ouagadougou après trois ans au Burundi ?

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Wolfram Vetter : J’étais très heureux parce que le Burkina Faso est un pays important pour l’Union européenne et c’est un pays ami. Avec ce pays, nous avons de bonnes relations. Pour cela, j’étais vraiment content d’avoir eu cette nomination.

Burkina 24 : Avant votre arrivée, vous avez surement été briefé sur le Burkina Faso. Comment appréciez-vous cela par rapport aux réalités depuis votre arrivée en septembre dernier ?

Wolfram Vetter : Evidemment, je me suis préparé pour mon poste. J’ai échangé avec des collègues à Bruxelles, j’ai été briefé. Mais c’est toujours autre chose quand on arrive. Sur le terrain, quand on rencontre des personnes, des collègues ici à la délégation, des représentants du gouvernement, la société civile, on a une autre dimension. J’ai appris surtout que la situation est encore plus complexe et riche par rapport à ce que j’avais entendu.

Je continue d’être agréablement surpris. La coopération, le dialogue avec le gouvernement, c’est très amical, les Burkinabè en général sont très accessibles, très ouverts et j’ai aussi le sentiment qu’il y a cette détermination, mais aussi cette volonté et cette capacité de gérer et de sortir de la crise. Je trouve chaque jour, de nouveaux éléments qui m’encouragent et qui me donnent le sentiment, malgré toutes les difficultés, que le peuple burkinabè est bien positionné pour sortir de cette crise.

Burkina 24 : L’Union européenne accompagne le Burkina Faso pour la mise en œuvre de son Plan national de développement économique et social (PNDES)  à hauteur de 800 millions d’euros. Allons-nous assister à un réaménagement avec votre arrivée ?

Wolfram Vetter : Le Burkina Faso est l’un des pays en Afrique qui reçoit le plus d’assistance financière. Nous travaillons dans le long terme et nous sommes aussi capables de nous adapter aux nouvelles situations. Nous sommes constamment en dialogue avec les autorités pour voir s’il faut ajuster notre assistance, voire identifier de nouvelles priorités. Vu la situation sécuritaire que nous vivons, nous allons mettre plus d’accent sur cet aspect, mais aussi la cohésion sociale, la résilience et aussi sur les questions humanitaires.

Burkina 24 : Justement sur ces questions sécuritaires, quel est votre regard sur cet aspect ?

Wolfram Vetter : C’est très complexe ; je ne suis pas encore vraiment en position de comprendre encore moins d’expliquer cette situation sécuritaire. Mais on peut reconnaître cette complexité de la situation. Les réponses doivent être multiformes. Il n’y a pas que la réponse militaire. Il y a la réponse développement, et il faut prendre en compte tous les défis que ce soit la menace de l’extérieur, les djihadistes qui viennent d’autres pays… Il y a aussi, de plus en plus, les tensions intercommunautaires. Il faut ainsi voir tous les aspects qui rendent la situation si difficile pour définir la réponse et aller au-delà de la réponse militaire.   

Burkina 24 : La France et les Etats-Unis déconseillent la destination Burkina Faso à leurs ressortissants. Selon vous, est-ce que le Burkina Faso est un pays infréquentable pour les occidentaux ?

Wolfram Vetter : Evidemment, le Burkina Faso est fréquentable. Nous sommes ici. Nous avons une forte délégation avec un grand nombre de collègues expatriés. Nous avons beaucoup d’activités dans plusieurs parties du pays. Mais il faut le reconnaître, il y a un problème de sécurité. Là, nous avons la responsabilité comme Chef de délégation, de ne pas prendre de risque, ne pas mettre les collègues en danger. Ainsi, nous suivons les consignes de sécurité d’autres pays partenaires qui ont cette analyse de la situation.

C’est dommage parce que je suis venu en espérant que je pourrais voyager et découvrir ce beau pays. On est un peu restreint, mais je reste confiant que dans l’avenir, on aura cette possibilité de voyager.

Burkina 24 : En rapport avec la situation sécuritaire, l’embrasement de la sous-région est aussi lié à la crise libyenne. Les Chefs d’Etat du G5 Sahel l’ont répété à l’envi. Concrètement, que font les pays européens pour la résorber ?

Wolfram Vetter : Je répète, la crise est complexe. Il y a différentes causes. La chute de Kadhafi a joué un rôle mais il y a aussi beaucoup d’autres causes. La crise en Algérie a aussi des effets qu’on peut ressentir ici, la crise au Mali… Nous sommes très engagés.

Nous essayons d’aider la Libye. Nous travaillons au niveau régional avec le G5 Sahel. Il y a vraiment des efforts de notre côté pour répondre d’une manière inclusive, à ces défis avec une approche politique mai aussi militaire et développement.

Maintenant, la question qui se pose profondément, c’est comment on peut travailler encore et mieux ensemble avec les pays concernés. Notre rôle, c’est de travailler avec tous ces pays, dont le Burkina Faso et d’autres pays dans la sous-région dans leur façon d’assumer leur responsabilité.

Burkina 24 : Vous avez parlé de la responsabilité des pays de la sous-région, mais par rapport à celle des pays européens, notamment la France, concrètement, qu’est ce qui est fait pour résorber cette crise ?

Wolfram Vetter : Je l’avoue, je ne suis pas un expert de la Libye, mais ce n’est pas une problématique que l’Union européenne peut résoudre elle-même. Il y a un cadre qui est donné par les Nations-Unies et la solution doit être trouvée dans ce cadre. Nous, Union européenne, nous sommes très engagés pour soutenir ce processus des Nations-Unies.  

Burkina 24 : Toujours dans le domaine sécuritaire, l’Union européenne soutient le Burkina en appui budgétaire. Mais qu’en est-il de la coopération militaire avec les pays européens ?

Wolfram Vetter : Plusieurs pays européens sont déjà engagés, pas seulement la France qui est particulièrement engagée, mais d’autres pays comme le Danemark, l’Italie, les Pays-Bas. Ces pays essayent de soutenir le gouvernement dans ses efforts. L’Union européenne est aussi engagée. Nous avons l’appui budgétaire comme vous l’avez mentionné.

Mais nous avons aussi des projets concrets au niveau national. Nous avons équipé les militaires, nous avons financé des outils de déminage, des kits de protection personnelle, et dernièrement, nous avons financé des blindés. Nous avons beaucoup d’autres activités qui sont en cours ou qui sont en préparation en soutien au gouvernement au niveau national.

Mais au niveau régional, nous sommes également engagés pour le soutien du G5 Sahel. Là aussi, notre soutien financier est très important, qui se rapprochera bientôt des 240 millions d’Euros. 

Burkina 24 : Par rapport justement au G5 Sahel, les Chefs de l’Etat de la CEDEAO se sont réunis dernièrement à Ouagadougou pour se pencher sur  la situation sécuritaire au Sahel. Plusieurs observateurs estiment que cela sonne comme un requiem pour le G5 Sahel. Etes-vous de cet avis ?  

Wolfram Vetter : Pas du tout. Ce n’est pas mon impression. C’est une bonne initiative de la CEDEAO parce que la problématique du djihadiste dépasse déjà les frontières du G5 et c’est très bien que les pays membres de la CEDEAO se concentrent de plus en plus sur cette question et essayer d’être complémentaires. Je crois que c’est un soutien au G5.

Burkina 24 : Dans les couloirs de l’Union européenne, qu’est-ce qui se dit sur la probabilité de la tenue de l’élection présidentielle en 2020 sur l’ensemble du territoire burkinabè ?

Wolfram Vetter : Nous avons beaucoup échangé avec les autorités, avec la CENI, avec la société civile sur la question des élections qui va être certainement un des points essentiels pendant les mois à venir. Mon impression est très claire, il y aura ces élections. Il y a vraiment cette volonté, cette détermination de toutes ces parties et nous allons soutenir ces élections financièrement, politiquement.

Je suis en même temps tout à fait conscient du défi du fait qu’il y a des zones qui ne sont plus accessibles, du fait qu’il y a plus de 500.000 personnes déplacées. Pour moi, il faut surtout trouver le moyen d’assurer la participation de ces déplacées internes. Là aussi, j’ai été rassuré par les efforts du gouvernement et de la CENI.

Burkina 24 : Sous quel signe sera placé votre mandat ?

Wolfram Vetter : Je veux mettre en avant les intérêts européens qui sont d’assurer la stabilité et la sécurité dans la région, mais aussi l’amitié avec le Burkina Faso avec lequel nous partageons l’attachement aux droits de l’Homme, surtout de démocratie. Je voudrais mettre ces points en avant, le partenariat avec ce pays qui a aussi un grand potentiel comme partenaire de la scène internationale. Et si je peux voyager à la fin de mon mandat au Burkina Faso, et découvrir sa beauté, je serais très content et je reste très optimiste que ce sera le cas.

Propos recueillis par Ignace Ismael NABOLE

Burkina 24

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Ignace Ismaël NABOLE

Journaliste reporter d'images (JRI).

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