Tribune │ Le Burkina-Faso revient de loin mais il revient

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Ceci est une tribune de Moussa Kéïta sur la situation sécuritaire au Burkina Faso.

Fin 2019, les attaques des Groupes Armés Terroristes et certaines rivalités inter-ethniques menaçaient le Burkina-Faso de s’effondrer très rapidement. Pays très vulnérable dans le G5 Sahel, on observe aujourd’hui, 6 mois après le sommet de Pau, des progrès fragiles mais bien présents.

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Le Burkina-Faso incarnait il y a quelques mois l’ensemble des reproches faits à la France dans le cadre de son dispositif Barkhane : perte progressive du terrain, pertes humaines lourdes et démoralisation galopante dans les rangs de l’armée…. Depuis quelques années, l’affaiblissement progressif de l’Etat burkinabè a débouché sur une paupérisation et un repli identitaire ethnique, favorisant alors insécurité, voire affrontements sanglants.

Ces rivalités inter-ethniques étant exploitées par les djihadistes faisant peser un risque mortel à un pays qui en compte une soixantaine [d’ethnies]. Si la France n’est pas responsable de cette situation, sa stratégie n’était plus adaptée à l’évolution de la menace terroriste dans le Sahel.

D’où l’objectif du Sommet de Pau de remobiliser ses partenaires du G5 Sahel, recentrer ses objectifs et bien entendu conserver et affirmer l’existant. Pour rappel, le Sommet de Pau qui se déroulât le 13 Janvier repose sur quatre piliers (opérations militaires, formation, développement et gouvernance) devant se synchroniser dans le cadre de la nouvelle Coalition pour le Sahel. Près de 6 mois plus tard, les résultats sont présents même si fragiles.

Reprise du terrain

Fin 2019, les parties Nord et Est du pays étaient considérées comme hors du contrôle de l’Etat. Quelques mois plus tard la hausse du tempo des opérations de la Force Barkhane, augmentée des ses renforts (600 hommes), est parvenue à infliger une pression de plus en plus forte aux GAT, perturbant leurs réseaux de logistique et de financement (trafic, etc). In fine, les opérations depuis 6 mois ont permis de reprendre le terrain perdu et en proie à une insécurité galopante.

De son côté l’armée burkinabè a connu une remontée en puissance notable. Coordonnée avec la force Barkhane ou les armées du G5 Sahel via les nouveaux mécanismes de commandement et de contrôle (Etat-Major) de la FC-G5S, l’armée burkinabè est parvenue à mener plusieurs opérations avec une autonomie croissante : démantèlement de la base terroriste de Tanwalbougou et d’Oursi ces derniers jours, participation aux grandes offensives dans les trois frontières des mois de mars et de mai, etc. On note également une coopération fructueuse avec l’armée ivoirienne ayant mené à des opérations couronnées de succès en mai et début juin (opération Comoé) destinée à pacifier la frontière commune de bases terroristes s’y situant.

D’un point de vue technique, il faut également citer les excellentes manœuvres  d’appui aérien coordonnées entre les Mirages Français et les Super-Tucano Burkinabè le 24 Décembre 2019 après une attaque djihadiste : une nouvelle capacité qui prouve que l’armée burkinabé peut acquérir des savoir-faire.

Ces succès ne doivent cependant pas masquer le manque encore important de formation de ses cadres malgré l’existence d’écoles d’officiers reconnues et soutenues par la France. La formation d’un noyau solide d’officiers (et de sous-officiers) prend certes plusieurs années mais c’est la condition à la montée en puissance de l’armée du « pays des hommes intègres ». Dès lors le pays pourra enclencher le cercle vertueux qui lui permettra d’intégrer du matériel plus performant et des tactiques plus complexes.

Développement civil

Dans la lignée des dispositions prises à Pau, de nombreux programmes de développement ont été lancés. Des programmes qui ne pourraient se dérouler sans une relative sécurité et stabilité, témoignant dès lors des succès engrangés ces derniers mois.

Les investissements les plus notables se sont manifestés depuis le début du mois de juin 2020 sur le volet développement d’une part avec un financement de l’Agence Française de Développement (75M d’euros) pour le programme d’électrification rurale Yeleen ou bien un financement de 60M d’euros de l’Union Européenne (UE) afin d’amortir le choc de la crise sanitaire. D’autre part, conformément aux objectifs de la coalition pour le Sahel, le volet gouvernance n’a pas été oublié et a abouti au versement de 147 Millions de dollars (deuxième financement sur les trois prévus) destinés à améliorer les processus de gestion des finances publiques, les services sociaux ou encore le système de santé.

En définitive si les gains sont réels ils devront être confirmés et amplifiés lors du Sommet de Nouakchott dans quelques jours. Si la France, les pays du G5 et tous les partenaires de la coalition pour le Sahel semblent déterminés à œuvrer pour stabiliser la région, le Burkina-Faso doit fournir un effort toujours plus soutenu afin de voir l’Etat remonter en puissance et diriger efficacement son territoire.

C’est le cas du nord qui ne pourra pas être tenu éternellement si les efforts déployés par les armées françaises et burkinabè ne débouchent pas sur une remontée notable de la gouvernance et la reconstitution d’un sentiment patriotique transcendant les ethnies. Même après les revers subis par l’armée burkinabè, les djihadistes n’ont pu exercer qu’un contrôle relatif et semi-clandestin sur le pays. Du fait de la pression militaire mais aussi parce qu’en définitive ils se greffent plus aux problèmes internes du pays qu’ils ne les créent.

Moussa Keita, Journaliste

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