Tribune I Portrait : Monique Ilboudo ou le Burkina Faso au féminin

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Ceci est l’écrit d’un citoyen africain féru des relations internationales, Omar Sylla, sur Monique Ilboudo.  

Au pays des Hommes intègres, elle est sans nul doute l’une des personnalités les plus importantes de son histoire, mais Monique Ilboudo représente beaucoup plus qu’une personnalité publique, elle traduit ce que l’on pourrait nommer le Burkina Faso au féminin. 

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Tout d’abord, dans un pays où les hommes dominaient largement le milieu scientifique, elle a réussi à tirer son épingle du jeu en devenant la première femme à écrire et publier un roman au Burkina Faso.

Elle a également été la première femme à enseigner à la faculté de droit de l’Université de Ouagadougou, où elle a eu du mal à être prise au sérieux du fait de sa féminité. Mais cet obstacle ne l’a pas empêchée de mener ses combats. Au contraire, elle a su en faire une force en usant de sa notoriété pour mettre en lumière les difficultés d’être une femme au Burkina Faso. 

Dans sa lancée, elle devient auteur de la chronique « Féminin pluriel » dans le quotidien « L’Observateur Paalga » et crée l’observatoire « Qui-vive » qui traite de la condition de la femme burkinabè.

Par ailleurs, c’est bien par le biais de l’écriture que Monique Ilboudo arrivera à exprimer ses idées et à défendre cette cause aussi noble. En effet, dès l’année 1992, elle publie son premier grand roman intitulé « Le Mal de Peau » qui aborde la condition de la femme africaine dans la société burkinabè postcoloniale. Cet ouvrage remporte un vif succès et lui permet de recevoir le Grand Prix de l’imprimerie Nationale du Meilleur Roman. 

En 2000, elle écrit « Murekatete » qui veut dire « Laisse-la vivre ». Cet ouvrage met en scène une femme dont la vie, pour des raisons ethniques et politiques, se révèle quasiment impossible suite au génocide de 1994 et ses répercussions au Rwanda.

Elle publie en 2006 son œuvre la plus engagée sans doute : « Droit de cité : être femme au Burkina Faso ». Dans cet ouvrage, Monique Ilboudo propose une analyse juridique, historique, ethnographique et socioculturelle de plusieurs problématiques : les mutilations génitales féminines, la contraception, l’avortement, le viol, l’inceste, la sorcellerie, les lois autour du mariage, la polygamie, l’éducation des filles, la division du travail par genre et la sous-représentation des femmes en politique.

D’ailleurs, pour illustrer son engagement, lorsque questionnée par le média « Equal Times » sur les thèmes qu’elle aborde le plus souvent dans ses récits, elle répondait ceci : «  Mon travail revient toujours au combat des femmes. Je m’identifie à la défense des faibles, je n’aime pas l’injustice, j’aime la liberté. Je suis plus une femme de liberté qu’une femme de pouvoir. La chose qui me fait le plus mal, c’est quand quelqu’un essaie de m’empêcher d’être libre. Je ne supporte pas d’être privée de ma liberté. J’ai même dû me battre avec mes parents pour le préserver ».

Cette soif de liberté a pu se lire dans son roman « Si loin de ma vie » sorti en 2018 et a été au cœur même de son dernier travail « Carrefour des veuves » publié en 2020. Dans celui-ci, Monique Ilboudo aborde un sujet on peut plus actuel : celui des femmes qui perdent leurs bien-aimés sous le coup des actions djihadistes et intercommunautaires au Sahel.

Plus précisément, l’œuvre parle de Tilaine, une jeune femme mariée à un officier des douanes, Isma tué par des terroristes alors qu’il est en poste dans le nord du pays. Entre douleur et colère, Tilaine refuse la fatalité et crée avec deux amies une association pour venir en aide aux femmes et aux enfants victimes du terrorisme.

Avec ce roman, l’auteur a surtout voulu rappeler que les femmes ont, elles aussi, un rôle déterminant à jouer dans le cadre de la lutte contre le terrorisme au Sahel. Car, en plus d’être au front avec leurs frères d’armes, elles sont aussi celles qui restent et qui doivent faire face à l’absence de leurs époux, pères et frères qui risquent leurs vies au quotidien. Parfois, sans jamais avoir l’occasion de les revoir.

Enfin, la place de Monique Ilboudo dans le milieu littéraire burkinabè, voire africain, n’est plus à préciser. Mais il convient de rappeler, que celle qui incarne le Burkina Faso au féminin et qui fait la fierté de toute une génération de femmes mérite d’être magnifiée et honorée aussi souvent que nécessaire.

Omar Sylla

@Le_Ndar_Ndar

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